Et quand de ton cœur bleu, j’ai saisi le battage, je me suis allongée sur ma douce in-quiétude.
La chanson du rideau était bleue elle aussi,
était grise
sous le vent chuchotant ce qui n’était pas nous et qui n’existait plus, disparaissait au loin derrière la vitre entrouverte.
Le mur s’hérissa d’un frisson. Alors, sur ta poitrine, comme sur un oreiller, j’ai posé doucement la tête.
Les yeux fermés, j’ai vu ta main qui courrait sur mon bras, la tiédeur de ta paume, j’ai senti sa musique, jouée du bout des doigts,
hésitante,
celle d’un animal qui explore sa piste.
Chemin inexorable, bleu lui aussi,
étonnant,
comme le bleu qui crie là où se nouent les flammes, ce point d’incandescence, parcelle de feu bleu, la plus chaude, la plus pure qui s’habille de froid pour brûler mieux encore.
Et mon corps tout entier pressentait sa venue, savait qu’il terminerait sa course inquiète dans la zone orangée, palpitante, où nous ne ferions qu’un.
Et j’ai ouvert les yeux, pour oublier le bleu.
Ne plus vibrer. Te voir.
Je ne te voyais pas, n’entendais pas non plus,
ne restait que ce goût sur mes lèvres, un goût violent et sans appel.
L’envie pourpre, sanglante, de déposer ma bouche
quelque part sur ton corps.
Sylvie R. B.
Illustration : " Labour of Love", Julia Hamilton